La mission d’information sur les produits phytopharmaceutiques a poursuivi ces travaux de manière intense jeudi 30 novembre au matin, avec 3 auditions successives pendant 4 heures.
Nous avons d’abord entendu des représentants des chambres d’agriculture : Monsieur Didier Marteau, président de la chambre d’agriculture de l’Aube, secrétaire-adjoint des Chambres d’agriculture France et président de la commission environnement, Madame Virginie Brun, responsable du service dephy-ecophyto, et Monsieur Jérémy Dreyfus, chargé de mission optimisation des intrants. Ils nous ont indiqué que 25 à 30 % d’agriculteurs étaient déjà engagés dans une démarche de progrès, qu’un autre tiers était intéressé, mais qu’un dernier tiers n’était pas réceptif aux changements de pratiques agricoles. Parmi les agriculteurs déjà engagés, on compte les 3 000 fermes DEPHY, qui concernent 255 groupes d’une douzaine d’agriculteurs chacun.
Nous avons ensuite reçu l’association Phytovictimes et son président Paul François, agriculteur de 54 ans et auteur du livre « Un paysan contre Monsanto ». Céréalier depuis 30 ans sur une parcelle de 240 hectares en Charente, Monsieur François a été victime d’un accident en 2004 lié à l’utilisation d’un désherbant produit par Monsanto, le Lasso, ensuite retiré du marché français en 2007. Monsieur François a porté plainte contre Monsanto en 2007, une affaire qui n’a toujours pas connu son épilogue à ce jour (malgré une condamnation de l’entreprise en première instance, puis en appel). Il a créé l’association Phytovictimes en 2011, qui s’est rapidement trouvée submergée par des demandes d’agriculteurs malades suite à l’utilisation de pesticides : elle compte aujourd’hui 300 adhérents et prend en charge 350 dossiers. Monsieur François estime que des milliers d’agriculteurs ont été impactés et que nous sommes à la veille d’un grave problème de santé publique, puisque les pathologies apparaissent 20 à 30 ans après l’exposition aux pesticides. Alors qu’il recourait essentiellement dans le passé à la solution chimique, il travaille désormais en bio sur une partie (105 hectares) de son exploitation. Selon ce lanceur d’alertes, il existe des solutions alternatives et des initiatives sur les territoires, qu’il faut faire connaître et développer dans tout le pays.
Enfin, nous avons auditionné le direction générale de la prévention des risques du ministère de la transition écologique et solidaire : son directeur général Marc Mortureux et le chef du service des risques sanitaires liés à l’environnement, des déchets et des pollutions diffuses Cédric Bourillet. Ils nous ont rappelé que, selon l’OMS, 26 % des décès dans le monde seraient liés à des causes environnementales (pollution de l’air intérieur et extérieur, exposition aux produits chimiques, milieu professionnel). Il n’existe pas d’étude similaire pour la France, mais nous savons que 48 000 décès prématurés dans notre pays sont liés à une mauvaise qualité de l’air extérieur. Ils nous ont confirmé que le lien entre les agences nationales d’évaluation (comme l’ANSES) et les agences européennes (EFSA) n’était pas satisfaisant. Au niveau des alternatives, ils estiment nécessaire de développer le biocontrôle : dans cette optique, il convient d’accompagner les porteurs de projets à constituer leur dossier face à une réglementation européenne très lourde.