Le 31 août dernier, au lendemain de leur visite au Centre de Détention de Muret (qui héberge les détenus condamnés à de longues peines), Elisabeth Toutut-Picard et son attachée parlementaire Karine Brun ont longuement visité la Maison d’Arrêt de Seysses.
La Maison d’arrêt de Seysses reçoit les prévenus en attente de jugement, les condamnés à des peines inférieures à deux ans et les condamnés en attente d’affectation dans un autre établissement.
La députée s’est rendue dans les deux centres pénitentiaires situés sur sa circonscription pour en découvrir le fonctionnement et mesurer les enjeux du projet de construction d’une nouvelle prison sur le territoire muretain.
Elle voulait également évaluer l’intérêt et la faisabilité d’un projet de formation spécifique dédié aux détenus tel qu’elle l’avait inscrit dans son programme de candidate.
Sa démarche ne s’inscrivait donc pas dans le cadre d’un mandat parlementaire, ni dans celui d’un audit du fonctionnement des prisons.
Une visite complète de près de 6 heures a permis à Elisabeth Toutut-Picard de prendre connaissance des problèmes auxquels sont confrontés la direction de l’établissement, le personnel pénitentiaire et les détenus.
Cette visite a été précédée et nourrie par divers échanges informels avec des représentants du personnel pénitentiaire syndiqués et non syndiqués
Mme la députée tient à remercier M Moumaneix, directeur d’établissement, M.Mandou, directeur de détention, et M.Cazau adjoint au chef de détention, pour leur disponibilité et leur totale transparence.
La direction et le personnel de l’établissement se sont prêtés à un dialogue constructif en acceptant de répondre objectivement à toutes leurs questions. À la demande de la direction et dans le souci de préserver la sécurité du personnel de l’établissement, certaines des photos illustrant ce billet ont été retouchées pour masquer des visages ou éviter de dévoiler certaines informations sensibles.
Les sujets d’actualité, tels la radicalisation, la violence, les trafics, la drogue et les envois par dessus les murs d’enceinte ont tous été abordés sans détour.
C’est dans le même esprit de transparence qu’ont été évoqués le sujet de la formation du personnel pénitentiaire et les difficultés auxquelles il doit faire face pour accomplir ses missions dans un contexte marqué par une population carcérale en surnombre encadrée par une équipe de surveillants en sous effectif.
Surpopulation carcérale et sous effectif de surveillance : une situation complexe générée par de nombreux facteurs.
La maison d’arrêt de Seysses, créée en 2003, souffre depuis plusieurs années d’une situation chronique de surpopulation carcérale. A ce jour, la maison d’arrêt abrite plus de 1200 détenus, hommes ou femmes, alors qu’elle ne dispose officiellement que de 700 places.
Contrairement au Centre de Détention de Muret « protégé »par un numerus clausus règlementaire de détenus, la Maison d’arrêt de Seysses se doit d’accueillir tous les détenus qui lui sont envoyés.
La maison d’arrêt de Seysses reçoit 252 arrivants par mois soit 10 à 12 arrivants journaliers, chiffres qui excèdent notoirement sa capacité d’accueil.
Nombreuses sont les cellules de 9 m2 qui hébergent 3 détenus (deux lits superposés et un matelas au sol).
Il a été indiqué à la députée qu’en janvier dernier l’établissement recensait au total 134 matelas posés sur le sol.
Cette situation très tendue ne pourrait être fondamentalement améliorée que par la création d’une nouvelle prison dont la construction est programmée sans avoir été encore officiellement entérinée.
Au cours de sa visite la députée a pu constater que la mise en chantier d’un nouvel établissement est une demande partagée par la quasi totalité des personnes qu’elle a pu rencontrer et interroger.
Cet état de surpopulation numérique est aggravé par la difficulté à appliquer des aménagements de peines et à mettre en place des peines alternatives pour les détentions de courte durée.
L’addition de ces obstacles participe également à l’engorgement des Maisons d’arrêt.
Par ailleurs l’établissement souffre d’un manque récurrent de personnel : 11 postes vacants de personnels non remplacés à ce jour par l’administration pénitentiaire qui gère directement les effectifs ; 1 seul surveillant en moyenne pour 90 détenus, et une situation particulièrement délicate dans le SPIP (Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation) service en charge de la réinsertion sociale des détenus, qui ne dispose que de 2 cadres au lieu des 5 postes requis.
La direction de l’établissement se heurte notamment à la difficulté de compenser les départs dus à des mutations ou à des départs en retraite. Il semble que l’obligation faite aux nouvelles recrues de passer prioritairement dans des établissements parisiens souvent difficiles, génère nombre de démissions de début de carrière, défections dont pâtit tout le reste du système pénitentiaire.
L’image de marque de cette profession mal connue, objet de projections et fantasmes, souvent et à tort péjoratifs, finit par décourager les éventuelles vocations.
L’aspect répressif de la profession occulte la dimension humaine du travail d’écoute, d’éducation et d’accompagnement à la réinsertion sociale des détenus réalisé au quotidien par le personnel pénitentiaire.
Ce travail social est souvent méconnu du grand public qui ne connaît pas non plus l’existence de l’offre de soins somatiques, psychiatriques et éducatifs dont bénéficient les détenus.
Les visiteuses ont pu ainsi découvrir l’existence d’une nurserie pour les enfants des détenues et la présence de deux équipes hospitalières intégrées SNPR jour/nuit appartenant aux services psychiatriques externalisés de l’UHSA (Centre hospitalier psychiatrique G.Marchant) et de soins somatiques de l’UHSI (CHU Toulouse, site de Rangueil).
L’établissement possède également une bibliothèque et une salle de sport mises à la disposition des détenus.
Mais la direction de l’établissement n’a pas caché non plus l’existence de nombreux trafics internes qui complique par ailleurs le travail des surveillants : en une seule année 7kg de stupéfiants et 850 téléphones ont été récupérés dans les cellules….
Après avoir assisté à la réunion de présentation de l’établissement faite par la direction de la maison d’arrêt et par la directrice du SPIP, Elisabeth Toutut-Picard et son assistante ont entamé leur visite en suivant l’ensemble du circuit arrivant, partant de l’écrou- greffe jusqu’aux bâtiments de détention.
Le quartier arrivant (présentation des modalités d’organisation du quartier arrivant, quartier labellisé « Dekra-Certification », conforme aux Règles Pénitentiaires Européennes et à la Mission des Pratiques Professionnelles Pénitentiaires)
L’écrou greffe (formalités d’écrou, biométrie, dispositif d’accueil)
Le couloir d’entrée et la cellule d’attente
Suite du circuit « arrivant » : l’incarcération
La maison d’arrêt, quartier des femmes, visite de cellules et échanges avec le personnel.
Visite d’une cellule mère-enfant adaptée et du secteur nurserie (pour enfants jusqu’à 2 ans)
Rencontre et échanges très intéressants avec les équipes de soins psychiatriques et somatiques
du pôle sanitaire (unité sanitaire et SMPR ( service médico- phycologique régional ))
Visite des ateliers du secteur de production et des plateaux formations professionnelles
Le travail joue un rôle essentiel dans la maison d’arrêt, il rythme les journées des détenus.
Au cœur de la prison, il est fréquent de découvrir que des cellules de 9 mètres carrés sont occupées par 2 à 3 détenus, situation conduisant à poser des matelas à même le sol.
Tours de surveillance et espaces de promenades
Les espaces de promenade vus d’une des tours de surveillance.
Les systèmes de protection (mur surélevé, grillages anti hélicoptères) ne permettent pas d’éviter les « projections » en tous genres vers l’intérieur de l’établissement : téléphones, cannabis, viande, petites armes… Ces intrusions, dangereuses pour sa sécurité, sont régulièrement dénoncées par le personnel pénitentiaire.
En photo : Plusieurs systèmes d’échanges improvisés, de cellule à cellule, parfois d’un bâtiment à l’autre, permettent aux détenus de poursuivre un « business » à extérieur à la maison d’arrêt et ce, malgré la vigilance soutenue de surveillants insuffisamment nombreux.
Visite de la bibliothèque et de la salle de sport
Une salle de sport et de musculation bien équipée ainsi qu’une bibliothèque sont à la disposition des détenus
Enseignement et formation des détenus
La visite des nouveaux locaux d’enseignement et de formation des détenus a donné à Elisabeth Toutut-Picard l’occasion d’avoir des discussions approfondies avec des enseignants manifestement motivés.
Elle a pu leur faire partager son souhait de construire un projet de formation adapté à un public majoritairement allophone et souvent illettré afin d’accompagner son insertion sociale et culturelle à la sortie de prison .
Elisabeth Toutut-Picard tient à remercier les membres du personnel pénitentiaire pour la qualité des échanges qu’elle a pu avoir avec eux et pour leur implication dans une mission difficile.
La secteur pénitentiaire dans son ensemble mériterait d’être bien mieux valorisé aux yeux de la société et de bénéficier d’une meilleure image tant son rôle est décisif dans la prévention des récidives par l’insertion ou la réinsertion des détenus.
A la suite de ses visites dans les deux établissements pénitentiaires de sa circonscription, Elisabeth Toutut-Picard a interpellé Madame la Ministre de la justice et l’a notamment interrogée sur l’état d’avancement du dossier de construction de la nouvelle prison du muretain.
Elle lui a également proposé ses services pour réfléchir, dans le cadre d’une mission parlementaire ad hoc, à une démarche de formation spécifique pour les détenus afin de les préparer à leur insertion sociale et ainsi éviter les nombreuses récidives liées à l’absence de qualification professionnelle et au chômage.
La députée présentera également ce projet à la Ministre du travail dans le cadre du dossier de formation porté par ce ministère.